Chapitre 3

 (TOUT OMM CE L OMM / TOUT MOUN CE MOUN) 

VERS HAITI CHERIE, UNE NOUVELLE HAITI 

Une Analyse des Causes de la Situation Actuelle en Haïti et un Moyen d’en Sortir 

AOUT – NOVEMBRE 2022 – Actualisé le 11 janvier et le 29 octobre 2023 
Par Georges-Michel Celcis 

Chapitre 3

L’Haitien, Sa Mentalité, Ses choix


Les composantes ethniques de l’Haïtien

Le peuple Haïtien d’aujourd’hui, est composé d’une multitude d’ethnies Africaines, et aussi Européennes, Moyen Orientales, et autres.   

La composante Africaine consiste en descendants d’au moins une cinquantaine d’ethnies Africaines, transportées contre leur gré, chacune parlant sa langue, ce que le colon exploitera pour les diviser. Leurs membres qui ont survécu à l’esclavage ont traversé, au moins, quatre épreuves traumatisantes :  la capture, les tortures-triages avant la vente et l’embarquement, la traversée 

de l’Atlantique en négrier, et l’esclavage à Saint Domingue, réputé avoir été l’un des plus féroces de tous.  Chacune de ces épreuves a vu son lot d’hommes, de femmes et d’enfants succomber aux maltraitances et tortures. 

Ces épreuves ont laissé des séquelles traumatiques, tant physiques que mentales, affectant les gènes de tous les afro-descendants de notre continent, toutes nuances de couleurs de peau confondues. Parmi les séquelles physiques identifiées scientifiquement : la propension au diabète et à l’hypertension et les troubles de stress post-traumatiques.  Les séquelles mentales dominantes : la méfiance et l’appréciation du respect. 

La composante Européenne consiste principalement en descendants de Français, d’Allemands, d’Italiens, de Scandinaves, et de Juifs, dont certains des ancêtres étaient présents sur le territoire du temps de la colonie.  Les immigrants de chacun de ces pays sont arrivés parlant la même langue.  Ils sont venus de leur propre gré, trimbalant leur culture respective. 

La composante Moyen-Orientale, venant principalement de la Syrie, du Liban et de la Palestine, s’est introduite en Haïti durant la deuxième moitié du XIXème siècle, cherchant fortune ou fuyant les difficultés de leurs pays.  Ils n’ont pas été bien accueillis.  Le rythme de leurs arrivées s’accélérait durant les années 1970, jusqu’à constituer une présence économique dominante aujourd’hui.  Ils se sont adaptés rapidement au créole, communiquant plus aisément avec la composante Africaine qu’avec les autres, ce qui a facilité leurs débuts en échanges commerciaux. 

La composante de migrants venus d’autres origines, inclut le cas particulier des Polonais. Emmenés à Saint Domingue comme soldats de l’expédition Leclerc, ils ont refusé de se battre contre l’armée indigène et se sont regroupés dans certaines villes du pays après la victoire de Vertières, bénéficiant de la nationalité Haïtienne accordée par un Jean-Jacques Dessalines reconnaissant. 

Ainsi, l’Haïtien est une mosaïque de mixages ethniques des différents groupes de la composante Africaine entre eux-mêmes, entre un faible pourcentage de cette composante avec les autres, et les autres, entre eux, généralement de couleur de peau blanche. Une vraie salade dans laquelle la composante Africaine domine à plus de 95%.  Notons l’absence des Tainos, quasi exterminés par las Espagnols dans le premier génocide du continent. 

De la mentalité de l’Haïtien

Dans son livre publié en 2004 intitulé « A la Recherche d’un Consensus après 200 Ans d’Indépendance : La Structure du Système Sociale Haïtien & Les Défis du Développement » à la suite d’une « Etude Spécialisée Commandée par La Fondation Nouvelle Haïti Et L’Initiative de la Société Civile Avec l’Appui de L’Union Européenne »1, la Dr. Tatiana K. Wah nous décrit avec détails et précisions dans son chapitre 3 « La Structure du Système Interne » (social Haïtien). 

Dans ce chapitre de 43 pages, Dr. Wah identifie les trente-et-un segments du système social Haïtien et nous offre une richesse d’informations sur l’élément humain Haïtien, central et indispensable à tout programme de développement. On y trouve tout ce qu’il faut savoir de la mentalité de l’Haïtien par rapport au développement de Haïti.  De cette longue liste de traits de caractère tant positifs que négatifs de l’Haïtien, qui servira aux ingénieurs sociaux pour aiguiller les stratégies d’acceptation et d’implémentation de programmes, deux retiennent mon attention, l’un négatif, l’autre positif : la méfiance et l’appréciation du respect.  

La méfiance, déjà présente en Afrique, s’est justifiée et installée dans le subconscient de nos ancêtres dès l’instant de leur mise en captivité, et cette hantise de besoin de respect découle de leur dantesque et avilissant sort vécu.  Tous deux ont été exacerbés par la pauvreté et le clivage pays-en-dedans pays-en-dehors. Au fil des siècles, ces traits se sont répercutés sur les trente-et-un segments du système social Haïtien.  Ils seront des ingrédients de leur mentalité durant toute leur vie et ils les passeront à leur progéniture, si elle ne les corrige pas. 

Une société composée d’individus dominés par la méfiance et le sentiment de mépris aura des problèmes.  Les impulsions négatives qui en découleront conduiront ces hommes et femmes au soupçon, l’envie, la jalousie, la mésentente, la rancune, l’hostilité, la trahison, le conflit.  Les vibrations émises par ces citoyens et citoyennes, loin de s’aligner en direction d’objectifs communs, iront dans tous les sens, s’enchevêtreront.  Au fil des années et des générations on aboutira à une tour de Babel résonnant de charabias individualisés. 

N’y sommes-nous pas ? 

Depuis janvier 1804 notre pays vit de querelle en querelle, de crise en crise, de confrontation en confrontation. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, en crescendos, nous nous retrouvons aujourd’hui dans un tourbillon frénétique, au fond d’un gouffre duquel les plus malins d’entre nous ne voient la sortie. La méfiance a abouti à la haine presqu’aveugle.  Nos frères s’entretuent.  En conséquence, le mépris envers l’Haïtien s’est universalisé… 

Notre mentalité nous y a conduit.  Fera-t-elle que nous soyons destinés à un avenir inavouable ? 

CONCLUSION : S’il est accepté que la responsabilité de l’état lamentable d’Haïti est partagée entre les « blancs » et l’Haïtien, retenons que : d’un côté, l’atmosphère empoisonnée créée par 

les « blancs » depuis le 1er janvier 1804, ajoutée à leurs manÅ“uvres semant perpétuellement la division, n’ont jamais permis à l’Haïtien de s’épanouir et de gouverner son pays correctement ; d’un autre côté, même en tenant compte des comportements autodestructeurs de l’Haïtien, la déroute dans laquelle le « blanc » maintient, sans état d’âme, le peuple Haïtien, le genoux sur le cou et la tête sous l’eau jusqu’à ce genou, est la preuve qu’en dernier lieu il, le blanc, a le dessus dans la part de responsabilité. 

Notons que je parle ici des causes négatives de notre situation attribuables aux « blancs ».  Haïti compte beaucoup d’amis de par le monde, tant au niveau des nations, des organisations et des individus qui ont généreusement contribué à son développement soit par amitié, reconnaissance, ou solidarité humaine.  Nous ne devons jamais l’oublier. Leurs multiples concours, tout comme les belles qualités de l’Haïtien, n’ont pas réussi à faire le contrepoids.  Ils seront encore à nos côtés face à notre détermination et assiduité dans l’exécution d’un programme valable. 

(Haiti,….  Haïti,.…  La de los Jacobinos negros …)  (Hugo Chavez)

3. une définition de l’environnement souhaité qui sera l’objectif commun à atteindre.

 Dr. Tatiana Wah, dans son livre cité plus haut, nous offre des pistes pour arriver à comprendre les vÅ“ux de l’Haïtien pour son futur, et énoncer une vision commune, l’objectif ultime pour notre patrie. 

Les travaux du Dr. Wah, basés sur des sondages de sous-groupes des 31 segments du système social Haïtien, présentent l’opinion de l’Haïtien par rapport à ses valeurs sociétales, ses aspirations, son identité, et ses besoins.  De la longue liste des opinions émises, je retiens les plus représentatives par ordre de pourcentage des réponses obtenues. 

L’Haïtien apprécie : le respect, le respect mutuel, la tenue des promesses, l’opportunité de travailler, le respect du travailleur performant, le besoin de confiance, l’entraide, le « kombit Â».  

Il n’apprécie pas : le mensonge, le manque d’opportunités, la mise en doute, le non-respect de la parole donnée, le vol, la médisance, le désaccord ouvert.   

(Il est surprenant que la réalité semble contredire ces appréciations exprimées par l’Haïtien.  Un exemple : il n’apprécie pas le mensonge, mais est menteur lui-même.  Les spécialistes en sciences humaines auront à en débattre.) 

Les résultats des sondages indiquent « un manque aigu de confiance entre les membres de la société Haïtienne » …. « La méfiance est fondamentale … ».  « Plusieurs observateurs de la réalité locale ont écrit au sujet de la haine féroce de l’élite pour les paysans et les déshérités des villes ».   Ces données expliqueraient « l’absence d’objectifs communs au sein de la société ». 

Toujours selon le sondage du Dr. Wah, l’Haïtien pense que ce qui unifie les citoyens, ce sont : le désir de changement, la religion, et « lorsqu’ ils s’amusent ». 

Pour son bien-être, l’Haïtien aspire à : la possibilité de travailler (« un travailleur bien payé n’est pas exploité »), l’accès à l’éducation et à la santé, la satisfaction de ses besoins essentiels, un succès matériel modeste, la vie en famille, un système judiciaire fiable, vivre sans crainte et dans l’intégrité. 

L’identité nationale se trouve, entre autres, dans : l’histoire commune, la langue commune, la fierté, et… la méfiance

Les responsables de nos malheurs : la mauvaise gouvernance, le secteur privé, nous tous, la classe politique.  Également mentionné : le « manque de promoteurs de développement ». 

L’analyse de ces caractéristiques nous permet de conclure que l’Haïtien souhaite : une vie en famille, un confort modeste acquis par le travail, l’accès à l’éducation, la satisfaction de ses besoins essentiels, une solidarité communautaire, être respecté et apprécié particulièrement par « l’élite », un  secteur privé juste dynamisant l’économie nationale, des gouvernants compétents, honnêtes, visionnaires et promouvant sa cause, un système judiciaire performant, des loisirs unifiants, une vie sans crainte.   

Ajouter à cela que l’Haïtien à l’étranger est reconnu comme un travailleur sérieux, discipliné, de grande endurance, et nous avons là les éléments essentiels à l’exécution de grands programmes. 

CONCLUSION : l’Haïtien veut vivre dans son pays, HAITI CHERIE, où il fait bon vivre, pour tous.  Là se trouve la réponse à la création d’un environnement qui incite les Haïtiens à rester chez eux, à rentrer vivre chez eux, l’objectif ultime pour la nation entière : LA CONSTRUCTION DE  

HAITI CHERIE : UN PAYS OU IL FAIT BON VIVRE, POUR TOUS. 


1 WAH, Tatiana K.- A la Recherche d’un Consensus après 200 Ans d’Indépendance : La Structure du Système Sociale Haïtien & Les Défis du Développement » à la suite d’une « Etude Spécialisée Commandée par La Fondation Nouvelle Haïti Et L’Initiative de la Société Civile Avec l’Appui de L’Union Européenne.  2004.  Ce livre est le rapport de la première étape d’un plus grand projet de la Fondation Nouvelle Haïti pour arriver à la définition d’une vision commune pour Haïti.